Écrit personnel: Adam Hugros, La dimension du lien

La dimension du lien

Longtemps, j’ai cru que la question de l’existence était la seule question digne d’être posée. Je me demandais : “Qu’est-ce que l’être ? Quel est le sens de la vie ?”. Je réalise aujourd’hui que je faisais preuve d’un rare égoïsme. Les questions qui m’intéressaient vraiment étant plutôt : “Qui suis-je ? Quel est le sens de ma vie ?”. Je crois à présent que la question de l’être n’est pas si importante, voire même qu’elle est stérile. Cette recherche ne peut mener qu’à une réalité où l‘unité de sa propre conscience est projetée au centre du monde. On s’imagine qu’il est possible d’isoler l’existence par la pensée. Et on présuppose l’unité de l’être. Mais alors, si cette question mène à une impasse, que faut-il chercher ?

Tout d’abord, nous pouvons nous demander comment les choses apparaissent. Pour cela, imaginons une page blanche de grandeur infinie. Le papier s’étend dans toutes les directions à perte de vue. Nous n’avons aucun élément de comparaison, il n’y rien à lier ensemble, rien à comprendre. Pour la pensée, le fond uni est équivalent au néant. Maintenant, dessinons un cercle au crayon sur cet univers de papier. A présent, nous voyons une forme se détacher sur un fond blanc. Ce cercle nous apparait parce qu’il contraste avec le papier.

Ainsi, nous pouvons voir d’une part le cercle que nous venons de tracer et d’autre part le papier. Si l’on se demande “Qu’est-ce que le papier ?” ou “Qu’est-ce que le cercle ?” comme s’il s’agissait d’éléments indépendants, capable d’être isolés par la pensée, nous faisons une erreur. C’est comme se demander “Qui suis-je ?” en se mettant soi-même dans le rôle du cercle et le reste du monde dans le rôle du papier.

Ce qui apparait lorsque l’on trace un cercle au crayon sur du papier, ce n’est ni le cercle, ni la feuille. En revanche, ce qui existe c’est la relation, l’interaction ou même l’échange entre les deux. C’est la communication entre les deux éléments qui existe véritablement. Autrement dit, les choses ne sont réelles en elles-mêmes, c’est le lien qu’elles entretiennent ensemble qui existe. Ce qui compte, ce n’est pas l’Homme, isolé, mais le maillage, c’est à dire le réseau de liens, qui lui donne sa place. Tous les phénomènes ne sont que l’expressions de liens.

Comme nous ne percevons que des liens, l’Homme est condamné à évoluer dans la dimension du lien. Nous pouvons voir l’humanité comme une chaine de liens qui n’a de sens que parce que les maillons sont liés les uns aux autres. Ainsi, d’autres questionnements surgissent : “Le lien est-il l’ultime limite de l’être humain ? La dimension du lien est-elle notre prison pour l’éternité ? Ou bien est-ce notre plus grande liberté ?” Le lien est à la fois unité, car il rassemble et forme un tout. Et multiplicité, puisqu’il est aussi une frontière. Il endigue, crée des contours et sépare plusieurs éléments. L’être humain recourt au langage pour découvrir des liens. Nous pouvons donc faire un pas de côté et nous détacher de la question de l’être, trop centrée sur soi, pour nous demander : “Qu’est-ce que le lien ?”.

Écrit par Adam Hugros, étudiant en 2éme année de license de mathématiques à l’Université Paris Est Créteil (UPEC).

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